Le scandale des Panama Papers a mis sur le devant de la scène médiatique le rôle joué par certains cabinets d’avocats. Des voix s’élèvent pour soumettre les avocats à des mesures de surveillance renforcées limitant leur indépendance et le secret professionnel dont cette profession peut se prévaloir. Nous souhaitons dissiper le fâcheux amalgame entre fraude et profession d’avocat que ces réactions médiatiques peuvent créer.
En premier lieu, il s’agit de distinguer les avocats de toute autre personne s’intitulant comme tel mais qui ne répond pas aux conditions posées par la loi suisse pour être inscrite au barreau. Ainsi, seuls les avocats répondant aux conditions de la loi suisse peuvent se prévaloir de ce titre et des conditions réservées par la loi à cette profession.
En second lieu, la très grande majorité des avocats, à l’instar du soussigné, n’est pas concernée par la constitution, la gestion ou la dissolution de sociétés panaméennes. Seule une petite minorité de membres du barreau a pu être mêlée à ce type de dossiers. En effet, la vaste majorité des avocats traitent de dossiers relevant de ce que l’on appelle de plus en plus communément « l’activité traditionnelle de l’avocat ». Il s’agit avant tout de la représentation en justice devant les tribunaux civils ou pénaux et devant les instances arbitrales, la négociation de contrats, l’exécution de successions, le conseil dans le cadre d’une problématique juridique particulière, par exemple dans le cadre d’une acquisition de biens mobiliers ou de biens immobiliers, de la gestion d’une propriété intellectuelle, du lancement d’un projet d’entreprise ou d’une action particulière. Dans ces situations, l’avocat peut se prévaloir d’un secret professionnel absolu garanti par le droit suisse. Il donne ainsi à l’avocat le droit de refuser de renseigner toute autorité, que ce soit oralement ou par le refus de transmettre tout document. Il ne peut être délié de ce secret, même par son client.
Tout autre est l’activité où l’avocat agit en dehors de ce cadre, par exemple en tant que courtier, prête-nom, intermédiaire, gérant de fortune ou comme acteur de toute activité commerciale. Ainsi, s’il agit comme administrateur d’une société panaméenne, l’avocat ne saurait être protégé par le secret professionnel absolu de l’avocat. Il sera soumis au cadre juridique ordinaire d’un homme d’affaires lambda.
Il est donc erroné et dangereux de vilipender les avocats comme s’étant abusivement abrités derrière leur statut professionnel pour s’adonner à des activités aujourd’hui dénoncées par les « Panama Papers ». Il serait surtout inutile de modifier le cadre juridique suisse actuel qui fait clairement la distinction entre les activités traditionnelles de l’avocat qui doivent être protégées par un secret professionnel absolu et indispensable à la bonne défense du client de l’avocat, de l’activité d’homme d’affaires qui suit le cadre ordinaire et dans laquelle l’avocat ne bénéficie d’aucune protection ou statut particulier.
Christophe Wilhelm, 7 avril 2016
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