Ce type de véhicule juridique est régi relativement strictement par le droit civil suisse aux articles 80 et 335 CC. Toutefois, la jurisprudence admet la validité de fondations de famille dites économiques sous la forme de structures holdings constituées aux fins d’assurer la pérennité d’un groupe familial.
Rappelons tout d’abord que selon l’article 335 CC, la fondation de famille de droit suisse ne peut servir qu’au paiement de frais d’éducation, d’établissement et d’assistance à des membres de la famille. Cette liste est exhaustive.
Selon le Tribunal fédéral (cf. SJ 2002, pp. 193 et ss.), l’article 335 CC limite les fondations de famille à des buts compatibles avec cette liste. Ces buts ont comme point commun de viser à pourvoir à des besoins particuliers de personnes faisant partie du cercle des bénéficiaires qui se trouvent à des étapes déterminées de leur vie ou dans des situations déterminées (jeunesse, en cours d’établissement de leur foyer ou de leur existence, situation de précarité). Selon la doctrine et la jurisprudence, il doit s’agir de besoins « courants ». Tel n’est pas forcément le cas du maintien dans la famille d’un immeuble particulier, à moins qu’il s’agisse d’un immeuble, comme une maison de vacances, affecté aux vacances ou aux loisirs des membres de la famille. A contrario, les fondations de famille qui viseraient à octroyer à leurs destinataires des prestations provenant du patrimoine de la fondation dans le but de faire bénéficier ces destinataires d’un niveau de vie plus élevé ou agréable, sans que ces prestations soient conditionnées par une telle situation ou étape de vie, sont assimilées aux fidéicommis de famille (ce par quoi il faut entendre l’attribution d’un bien ou d’un patrimoine de façon préfixe sur plusieurs générations d’une même famille – cf. Piotet, CR CC ad article 335 par. 26, p. 2047) et partant illicites en application de l’article 335 al. 2 CC. Selon la doctrine, le test porte sur le fait ou non de savoir si une valeur patrimoniale appartenant à la fondation de famille doit être maintenue dans la famille pour des générations (nullité selon le droit suisse) ou sert à atteindre un but spécial conforme à la liste de l’article 335 al. 1 CC. La différence est souvent difficile à faire en pratique.
Usuellement, les bénéficiaires n’ont pas à être désignés nommément mais peuvent très bien l’être. Ils doivent faire partie de la famille biologique du fondateur avec ou sans lien de parenté avec ce dernier.
Depuis le 1er janvier 2016, même une pure fondation de famille doit être inscrite au registre du commerce. Celles déjà constituées avant cette date ont jusqu’au 31 décembre 2021 pour ce faire. Elle est exonérée de surveillance étatique. Elle n’a pas besoin de nommer un organe de révision.
Au contraire, une fondation de famille qui aurait par ailleurs un autre but, par exemple idéal ou qui concernerait des bénéficiaires qui ne seraient pas liés par un lien de parenté serait considérée comme une fondation mixte devant être inscrite au RC, faire l’objet d’une surveillance étatique et se doter d’un organe de révision.
Le Tribunal fédéral, dans l’arrêt susmentionné, a confirmé la validité en droit suisse de fondations de famille dites économiques, soit de fondations de famille à but économique organisées, par exemple, sous la forme de « fondation holding », soit une fondation détenant un groupe de sociétés anonymes et ayant, entre autres, pour but le maintien du groupe en tant qu’entreprise familiale, l’octroi de contributions à la formation professionnelle et continue de jeunes particulièrement doués, la prévoyance professionnelle en faveur des employés du groupe des membres de leurs familles, etc… Naturellement, dans ce cas, il s’agirait non pas d’une pure fondation de famille, mais d’une fondation mixte soumise à surveillance.
Le Tribunal fédéral a cependant souligné que si les membres de la famille du fondateur sont les destinataires des prestations de la fondation holding, ces prestations doivent être servies dans les limites prévues par l’article 335 CC. Il est en outre crucial que le fondateur n’ait pas mentionné dans les statuts de la fondation que les actions des sociétés du groupe ou les bons de participation émis éventuellement par ces sociétés soient réservés aux membres de la famille. Si tel était le cas, on pourrait estimer que le fondateur aurait cherché à réserver ce capital aux membres de la famille et que cette intention contreviendrait à la nullité des fidéicommis de famille prohibés par l’article 335 al. 2 CC.
Le Tribunal fédéral a en l’espèce considéré qu’il est prépondérant que le fondateur entende avant tout maintenir et développer le groupe de sociétés qui est l’œuvre de sa vie et que ce but n’est ni illicite, ni insensé, ni inatteignable et qu’en conséquence il peut être validé juridiquement.
Auteur : Me Wilhelm le 27/11/2017
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