Le calcul des délais et des féries, légaux et judiciaires, fait partie du quotidien de l’avocat pratiquant au barreau.
Le maintien des droits de son client en dépendant, il est dès lors impératif que le calcul des délais et des féries soit maîtrisé par l’avocat agissant en représentation de son mandant. En outre, le Tribunal fédéral a admis qu’une erreur de calcul d’un délai constitue en principe une faute grave, dès lors que le respect des délais fait partie des devoirs élémentaires de l’avocat.
Le calcul des délais et des féries peut toutefois s’avérer complexe dans certaines situations. Tel est le cas notamment avec la coexistence des régimes prévus par le Code de procédure civile (CPC) et la Loi sur la poursuite pour dettes et faillites (LP) : chaque loi prévoyant son propre régime relatif aux délais, aux féries et aux suspensions y relatives, les renvois de l’un à l’autre créent une certaine incertitude pour les praticiens. La doctrine ne s’accorde d’ailleurs pas toujours sur le régime applicable dans certains cas. Cette situation, relativement imparfaite et contraire à la sécurité du droit, a conduit à un travail d’uniformisation entrepris dans le cadre de la modification du CPC et de la LP, dont l’entrée en vigueur est prévue le 1er janvier 2025.
A ce jour, le système prévoit que de manière générale, devant les autorités de poursuite, les règles des articles 142ss CPC sur les délais s’appliquent en principe en vertu du renvoi de l’article 31 LP, mais avec diverses exceptions. Celles-ci concernent tout spécialement la durée des féries d’été mais aussi l’effet desdites féries sur les délais en cours, pour lequel l’art. 63 LP prévoit des solutions originales (pas de suspension du cours du délai mais prolongation légale jusqu’au troisième jour utile suivant la fin des féries des délais venus à échéance pendant celles-ci). Sont aussi concernées par la réserve de l’article 145 al.4 CPC les règles spéciales de la LP sur la modification ou restitution du délai (article 33 LP)[1].
Dans les affaires devant le juge civil soumises au CPC, les règles spéciales concernant les féries de poursuites s’appliqueront parfois à l’exclusion des articles 145 et 146 CPC, en application de l’article 145 al. 4 CPC.
Ce sont essentiellement les délais d’ouverture d’actions prévus par la LP qui relèvent des articles 56 à 63 LP. Le régime prévu aux articles 56 à 63 LP ne s’appliquant qu’à des actes de poursuites, il s’agit de pouvoir établir si le point de départ du délai est ou non un tel acte afin de déterminer si le délai bénéficie de la règle du report prévue par l’article 63 LP.
A titre d’exemple, les délais de 10 ou 20 jours pour agir en libération de dette selon l’article 83 al. 2 LP, en contestation d’une tierce revendication selon l’article 107 LP, en constatation ou contestation de retour à meilleure fortune selon l’article 265a al. 4 LP, en opposition au séquestre selon l’article 278 LP, en validation de séquestre selon l’article 279 LP, etc. sont soumis au régime des articles 56 à 63 LP, et non au régime prévu par le CPC.
En revanche, tel n’est pas le cas des délais pour ouvrir action en revendication selon l’article 242 al. 2 LP ou en contestation de l’état de collocation selon l’article 250 LP, dès lors que de tels actes, postérieurs à la faillite, ne constituent pas des actes de poursuites[2].
Un doute demeure quant aux délais de recours en matière de mainlevée, soumis en principe aux règles du CPC, mais pour lesquels un ancien arrêt admettait l’application des article 56 et 63 LP[3].
L’articulation des régimes de la LP et du CPC étant inutilement complexe et contraire à la sécurité de droit, les modifications tant du CPC que de la LP prévues pour le 1er janvier 2025 permettront ainsi enfin une certaine uniformisation du droit.
La nouvelle teneur de l’article 145 al 4 CPC, qui opérait un renvoi aux règles de report des articles 56 à 63 LP, sera la suivante :
« Les dispositions de la présente loi sur la suspension des délais s’appliquent à toutes les actions relevant de la LP à déposer devant un juge. Elles ne s’appliquent pas à la plainte devant l’autorité de surveillance. »
De son côté, le nouvel article 56 al. 2 LP consacrera un renvoi exclusif aux dispositions du CPC sur la suspension des délais, applicables pour toutes les actions de la LP à déposer devant un juge.
Le recours au régime prévu par le CPC, sans renvoi au régime de la LP, permettra par conséquent sans doute de mettre fin à des situations susceptibles de mettre en péril la sauvegarde des droits de particuliers en raison d’erreurs de calcul de délais.
[1]ABBET Stéphane, in : CHABLOT/DIESTCHY-MARTENET/HEINZMANN (édit.), Petit Commentaire du Code de procédure Civile, Bâle 2021, n 9-12. TAPPY Denis in : BOHNET/HALDY/JEANDIN/SCHWEIZER/TAPPY (édit.), Commentaire Romand, Code de procédure civile, 2e éd. Bâle 2019, n 17-18
[2] Dans un arrêt ATF 149 III 179, le Tribunal fédéral rappelle que tous les litiges soumis à la procédure ordinaire ou simplifiée découlant de la LP ne bénéficient pas forcément de l’art. 145 al. 1 CPC. En effet, les art. 56 et 63 LP s’appliquent, par renvoi de l’art. 145 al. 4 CPC, lorsque le délai qui court est déclenché par un acte de poursuite (ATF 143 III 149 consid. 2.4.1.2).
[3] ATF 115 III 91, JdT 1991 III 175
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