Litiges en droit commercial

Bail commercial et location de locaux dits « bruts » : tour d’horizon

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Bien qu’elle ne soit pas expressément réglementée par le Code des obligations, la location de locaux dits « nus » ou « bruts » devient de plus en plus fréquente en matière commerciale.


Qu’entend-on par là et à quoi faut-il être rendu attentif en concluant un tel contrat ?


   A.    Qu’est- ce qu’un contrat de bail de locaux « bruts » ?


Un contrat de bail de locaux « bruts » est un acte bilatéral par lequel le bailleur cède l’usage de locaux non aménagés ou partiellement aménagés au locataire, qui devra alors assumer et finaliser l’aménagement des locaux.


Les aménagements de base sont ainsi mis à disposition par le bailleur, comme par exemple la structure du bâtiment, l’installation de l’eau courante, le système de chauffage. Les aménagements supplémentaires requis par le locataire seront à la charge de ce dernier.


La majorité des contrats de bail dits « bruts » concerne des locaux commerciaux. Il n’est cependant pas exclu qu’un tel contrat intervienne également dans une habitation, mais cela est moins fréquent.


Ces contrats deviennent de plus en plus recherchés puisqu’ils confèrent les avantages suivants :


Pour le bailleur :


  • Diminution des coûts de construction ;
  • Entretien des aménagements de base uniquement ;
  • Local commercial « neutre » pouvant facilement être reloué ;
  • Multiplication du nombre d’intéressés ;


Pour le locataire :


  • Choix sur-mesure des locaux loués sans en être propriétaire ;
  • Loyer adapté (les coûts des travaux d’aménagement du locataire ne pourront pas être pris en compte par le bailleur dans le calcul du rendement de la chose louée) ;


Les exemples les plus communs de tels contrats concernent principalement les activités des cabinets médicaux, des halles commerciales exploitant des industries particulières ou de bureaux.


Les installations du locataire peuvent par exemple être des parois intérieures non-porteuses, des revêtements de sols, des éclairages particuliers, des installations électriques à haut voltage, des cuisines professionnelles.


En résumé, tout semble à priori pouvoir être adapté sur-mesure aux besoins tant du bailleur que du locataire. Or en pratique, de tels contrats comportent fréquemment de nombreuses subtilités juridiques bien souvent méconnues.


   B.    Rédaction d’un contrat de bail commercial pour des locaux « nus » – à quoi faut-il penser ?


La jurisprudence exige que pour qu’un tel contrat soit valable, une compensation suffisante en faveur du locataire soit prévue.


Cela signifie que le locataire de locaux « bruts » doit être mis au bénéfice d’une contrepartie qui pourra prendre la forme par exemple d’un remboursement, d’une réduction de loyer, d’une indemnité à la fin du bail ou d’une durée prolongée du bail.


Il est dès lors vivement conseillé de mentionner dans le contrat de bail que le loyer convenu l’est pour la cession de l’usage de la chose à l’état brut uniquement.


Les parties doivent également être rendues attentives aux éléments suivants :


  • Quelles sont les installations de base et quelles sont les installations supplémentaires ?


Le bailleur et le locataire doivent distinguer les installations de base que le bailleur prendra à sa charge et entretiendra de celle que le locataire apportera et assumera.


Il convient de les lister expressément afin qu’aucune question d’interprétation du contrat ne survienne par la suite.


En pratique, il est conseillé de détailler dans le contrat les aménagements de base du bailleur et les aménagements supplémentaires du locataire et dans l’annexe au contrat qui est propriétaire de quel ouvrage, qui est responsable de l’entretien de quelle partie et par conséquent qui assume quelles réparations et leur déconstruction.


  • Qui paie quoi ?


L’annexe au contrat susmentionnée permettra également de clarifier la répartition des coûts de construction.


L’utilisation d’un tableau à remplir avec de simples croix est fortement recommandée, cela à des fins de clarté et pour éviter tout litige.


La question d’une éventuelle indemnité pour les plus-values apportées par le locataire doit également être précisée dans le contrat. L’éventuel amortissement des installations au fil du temps devrait aussi y figurer, tout comme la plus-value qui pourrait intervenir.


Le montant du loyer devra bien évidemment figurer dans le contrat, mais il devra être accompagné d’une clause précisant si dans la fixation du loyer, les montants assumés par le locataire ont été pris en compte. Il est dès lors conseillé d’indiquer le montant qui aurait été retenue si le local avait été aménagé intégralement par le bailleur, afin de pouvoir démontrer qu’une compensation a bien eu lieu.


Le locataire peut également se voir contraint de transmettre des garanties financières au bailleur pour les travaux entrepris. Le bailleur pourra par exemple lui demander de lui fournir des sûretés en cas d’hypothèque légale de la part des entreprises mandatées par le locataire.


  • Le locataire doit-il requérir l’accord du bailleur pour effectuer les travaux souhaités ?


Bien que cela paraisse évident, mais le locataire doit expressément accepter que les locaux lui soient remis dans un état « brut ».


De son côté, le bailleur doit donner son accord au locataire pour que ce dernier puisse effectuer les travaux de finition souhaités. Ainsi, le locataire ne pourra pas de manière unilatérale choisir ses sous-traitants, mais devra requérir l’accord du bailleur quant au choix des entreprises mandatées, cela avant le début des travaux.


  •  Quand le bail prend-il effet ?


Il faut préciser dans le bail si la location, et par conséquent le paiement du loyer, débute à la livraison des locaux « nus » ou ultérieurement et si le locataire est dispensé du paiement des loyers durant les travaux à effectuer.


  • Quid à la fin du contrat ?  


Les parties peuvent convenir dans le contrat de bail du sort des aménagements du locataire.


Les installations financées par le locataire peuvent être acquises par le bailleur à la fin du contrat. Si le bailleur envisage une telle éventualité, il lui est vivement conseiller de mentionner expressément dans le contrat qu’il renonce à une remise des lieux en leur état initial.


Au contraire, le locataire peut également se retrouver contraint de déconstruire ses aménagements. Il est important que le contrat précise cela et mentionne également les conséquences en cas de violation.


La question de l’indemnité à la fin du bail devra également être réglementée pour éviter tout doute.


  • Et en cas de transfert de bail ?


Le locataire a la possibilité de transférer le contrat de bail à un tiers (art. 263 CO). Il devra procéder à une « remise de son fonds de commerce » et sera disposé à répercuter les montant non amortis des travaux effectués en début de bail.


*****


Bien souvent, de tels contrats manquent de clarté et sont sujets à litige.


Afin d’éviter de telles situations et dans le but de préserver vos droits, il vous est vivement conseillé de vous entourer de professionnels en la matière.


Wilhelm Avocats SA vous assiste dans la rédaction de vos baux commerciaux et pour tous litiges y relatifs.

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