De plus en plus souvent, nous achetons des bons cadeaux, à offrir à nos proches ou pour bénéficier soi-même d’une offre promotionnelle dénichée sur Internet. Les sites proposant des week-ends en montagne et des dîners dans des restaurants gastronomiques à prix cassés se font de plus en plus nombreux et se font concurrence. Seul hic, ces bons cadeaux ont souvent une durée limitée. Que se passe-t-il alors lorsque la date d’échéance est passée ? Peut-on revendiquer auprès du prestataire le droit d’utiliser encore ce bon ? Est-il simplement perdu ?
Le droit des obligations ne contient aucune disposition spécifique au sujet des bons cadeaux. La doctrine les considère généralement comme des contrats en faveur de tiers ; le contrat est conclu entre l’acheteur du bon cadeau et le vendeur, mais c’est généralement un tiers qui en aura la jouissance.
Certains bons cadeaux représentent simplement le droit à l’exécution du contrat ou à la conclusion du contrat, alors que d’autres types de bon équivalent à un simple substitut au paiement d’une somme d’argent. Enfin, pour certaines autres catégories de bons, il s’agit d’une combinaison des deux variantes : le bon représente la conclusion d’un précontrat pour la conclusion ensuite d’un contrat principal avec présentation du bon en lieu et place du paiement d’une somme d’argent au prestataire (par exemple hôtel, restaurant, etc.).
La question de la durée de la validité d’un bon cadeau n’est pas non plus réglée par la loi et c’est pourquoi une partie de la doctrine considère que les règles générales de prescription des articles 127 et 128 CO sont en principe applicables, c’est-à-dire que la durée de validité des bons cadeaux est toujours équivalente au délai de prescription et qu’elle ne peut pas être raccourcie par contrat (cf. article du Prof. Rusch, paru dans la Jusletter du 12 décembre 2011 sur weblaw.ch).
En effet, l’art. 129 CO interdit la modification conventionnelle des délais prévus aux art. 114 à 142 CO. Cette interdiction s’applique aussi bien à la prolongation qu’au raccourcissement des délais. Cela signifierait qu’un bon cadeau pour des biens de consommation devrait être valable cinq ans (art. 128 CO), alors qu’un bon pour un service devrait être valable dix ans (art. 127 CO).
Or tel est rarement le cas des bons cadeaux ou coupons promotionnels achetés sur Internet, dont la validité est parfois limitée à quelques mois.
L’on peut donc se poser la question si dans le cas d’une « bonne affaire », à savoir dans le cas d’une prestation ou d’un bien de consommation à un prix exceptionnel, si la volonté contractuelle des parties de conclure un contrat avec une échéance / validité plus brève n’est pas tout de même admissible. Dans ce cas, le bon n’incarne que la créance d’une obligation fixe qui se fonde sur la volonté contractuelle des parties, dont l’exécution est exclue après l’expiration d’un délai généralement bref, sur la base d’un accord entre les parties.
Dans ce cas, il serait selon nous abusif d’invoquer un délai de prescription de cinq ou dix ans pour des promotions spéciales. Ainsi, les parties peuvent convenir par contrat d’une durée de validité spécifique, à condition que celle-ci soit visible dès l’achat et qu’elle ne soit pas déloyale. Des délais trop courts qui désavantagent fortement le consommateur peuvent ne pas être valables et considérés comme une condition commerciale abusive au sens de l’art. 8 de la Loi sur la concurrence déloyale.
La question se pose aussi de savoir s’il doit exister un délai dans lequel le bon est remboursable si le client ne souhaite pas bénéficier de la prestation ou du bien qu’il a ainsi acheté. En principe, l’art. 129 CO (respectivement les délais de cinq et dix ans) s’applique aussi au délai de remboursement du bon.
Dès lors que les consommateurs achètent une « action promotionnelle », à savoir une prestation à un prix inférieur au prix usuel, il serait possible de prévoir un délai de validité, un délai d’échange et un délai de remboursement inférieur aux délais de prescription de cinq, respectivement dix ans issus des art. 127 ss CO. Les usagers sont donc conscients qu’ils bénéficient de cette offre à des conditions particulières, qu’ils acceptent.
Pour les prestataires et vendeurs de tels bons cadeaux, il convient que les conditions générales soient rédigées d’une manière claire et précise, de sorte que le consommateur soit averti et ait connaissance de ces conditions avant de conclure le contrat, soit avant de commander le bon / coupon. Un affichage adéquat devrait également être prévu par le vendeur lors de l’achat en ligne, avec une indication claire de ces délais, avant l’étape du paiement. Les possibilités d’échange ou de remboursement ou encore de prolongation de la validité du bon devraient également être visibles pour le consommateur avant qu’il n’effectue son achat.
Enfin, si le coupon commandé sur Internet est transmissible ou s’il peut être commandé comme cadeau en faveur d’un tiers, il convient de souligner que l’utilisateur final du bon – qui n’a en principe pas payé lui-même pour la prestation – devrait être lié par les conditions de vente qui ont initialement été acceptées par l’acheteur du bon cadeau, si ce dernier en a été dûment et valablement informé et que ces conditions ne sont pas déloyales.
Nous conseillons donc aux entreprises qui proposent de tels bons, en particulier à celles qui entendent proposer des offres promotionnelles en ligne, de veiller à avertir le consommateur sur les conditions particulières de son achat et de se faire assister dans la rédaction de ses conditions générales de vente.
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