« Puis-je demander à mes employés de me confirmer qu’ils se sont fait vacciner et garder trace de leurs déclarations pour assurer un suivi ? »
Poser une telle question à ses employés peut être tentant. Après tout, l’employeur n’a-t-il pas l’obligation d’assurer la protection des travailleurs en application de l’art. 328 CO ? A ce titre, n’est-il pas légitimé à leur demander de se faire vacciner ou, à tout le moins, s’ils se sont fait vacciner ?
Si l’on comprend la tentation que les employeurs peuvent éprouver à poser une telle question à l’heure où la vaccination bat son plein, poser une telle question est certes envisageable, mais aucun employé n’a l’obligation d’y répondre.
La question de savoir si une personne est ou n’est pas vaccinée est en effet une donnée de santé qui, à ce titre, est considérée comme sensible au regard de la loi fédérale sur la protection des données.
En droit suisse, un traitement de données est illicite à moins d’être justifié par le consentement, un intérêt privé ou public prépondérant, ou la loi.
Certains pourraient certes arguer du fait qu’il existe un intérêt prépondérant de l’employeur à pouvoir s’assurer de l’état de vaccination de ses employés, ne serait-ce que pour conférer la sécurité nécessaire à tous ses collaborateurs.
La loi fédérale sur la protection des données n’admet toutefois un tel traitement, et donc la collecte d’une telle information, que si elle apparaît nécessaire et n’est pas disproportionnée. Or, des alternatives sont disponibles pour assurer un environnement de travail sûr, comme en témoigne aujourd’hui les plans cantonaux de test visant à permettre aux travailleurs de regagner leur place de travail et les différentes mesures prévues par le SECO.
Exiger des employés qu’ils se fassent vacciner ou répondent à la question n’apparaît dès lors, en soi, pas nécessaire au vu des alternatives disponibles, de sorte qu’aucun intérêt privé prépondérant ne justifie un tel traitement.
A tout principe des exceptions. Rappelons tout d’abord qu’il est loisible à l’employeur de poser une telle question, selon un protocole défini ci-dessous, mais que l’employé doit demeurer libre d’y répondre ou non à son entière discrétion.
On ne saurait cependant exclure certaines situations où la vaccination est tout simplement exigée pour permettre à l’employé de remplir son cahier des charges. Ainsi peut-il par exemple en aller d’un employé devant régulièrement voyager et qui refuserait de se faire vacciner ou de faire connaître son statut à ce sujet alors que la vaccination est une condition sine qua non pour se rendre dans le pays concerné.
En ce cas, un tel refus reviendrait au final à rendre impossible, à mon sens par la faute de l’employé tant l’atteinte à sa liberté personnelle semble ténue et justifiable, l’exécution de ses obligations. Un tel refus pourrait ainsi, au final, aboutir à une résiliation des rapports de travail.
D’ici quelques jours, nous serons tous en mesure de disposer d’un certificat COVID. Gageons que, compte tenu des avantages qu’il présentera, son succès est garanti.
S’il souhaitait établir un protocole sanitaire garantissant la sécurité de son environnement de travail, un employeur aurait à notre avis deux options parmi d’autres :
Permettre tout d’abord aux employés de présenter leur certificat COVID une fois pour toute (ou du moins aussi longtemps que les effets de la vaccination se font sentir) et, en cas de refus, se soumettre au protocole mis en place par l’employeur, assurément plus contraignant pour l’individu.
Alternativement, l’employeur pourrait essayer de lancer un modeste protocole de questions lors du retour sur site de chaque employé, leur demandant par exemple (1) s’ils se font fait vacciner, (2) s’ils envisagent de le faire, tout en leur donnant la possibilité (3) s’ils ne souhaitent pas répondre. La question de savoir si un tel questionnaire devrait être fait sur une base anonyme ou non dépend de l’objectif visé et doit être apprécié au cas par cas.
Quel que soit le choix retenu, il incombe à l’employeur d’informer les employés du protocole mis en place, des objectifs poursuivis par ce protocole (assurer la sécurité de l’environnement de travail dans l’intérêt de chacun), des personnes ayant accès à ces informations (qui devraient être limitées au strict nécessaire), de leur endroit de stockage et de leur durée de conservation (aussi longtemps que des mesures de restriction imposent à aux employeurs la prise de certaines mesures de protection compte tenu de l’évolution de la pandémie).
En conclusion, voilà une thématique où l’adage « poser la question c’est y répondre » ne trouve pas sa place.
S’il est loisible à l’employeur d’interroger ses employés quant à leur état de vaccination, il ne peut, sauf cas particulier, les obliger à répondre. Pour cette raison, il doit prévoir des protocoles alternatifs pour garantir la sécurité de son environnement de travail.
A supposer que l’état de vaccination de l’employé soit l’une des alternatives possibles, l’employeur doit alors mettre en place un protocole pour s’assurer du respect des exigences à poser en matière de protection des données, notamment quant aux informations devant être communiquées aux employés, libre à eux ensuite de communiquer une telle information ou de se soumettre au protocole alternatif mis en place.
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