Droit des sociétés

Séquestrer les biens d’un débiteur en Suisse tout en demandant l’exequatur d’un jugement étranger à l’encontre de ce même débiteur – un moyen rapide et efficace offert par le droit suisse au créancier

Séquestrer les biens d’un débiteur en Suisse tout en demandant l’exequatur d’un jugement étranger à l’encontre de ce même débiteur – un moyen rapide et efficace offert par le droit suisse au créancier

Le droit suisse prévoit la possibilité pour le créancier au bénéfice d’un jugement étranger en sa faveur, de séquestrer les biens du débiteur sis en Suisse, afin de garantir les créances reconnues dans ledit jugement. Il est également possible d’en obtenir préalablement l’exequatur, ce qui est parfois méconnu.


A.     Du séquestre


Le créancier menacé dans ses droits dispose d’une mesure conservatoire urgente : le séquestre.


Le but de cette institution est de pouvoir bloquer de manière immédiate des biens appartenant au débiteur, afin que ce dernier ne puisse les soustraire à une exécution forcée. Le débiteur se retrouve alors atteint dans sa capacité de disposer de certains de ses biens temporairement.


Le séquestre est une institution non sans conséquence puisqu’elle permet de manière immédiate et incisive d’atteindre les biens du débiteur.


Les cas de séquestre sont définis de manière exhaustive dans la loi et sont au nombre de six :


  1. Le débiteur n’a pas de domicile fixe en Suisse ;
  2. Le débiteur, dans l’intention de se soustraire à ses engagements, cèle ses biens, s’enfuit ou prépare sa fuite ;
  3. Le débiteur est de passage, ou rentre dans la catégorie des personnes qui fréquentent les foires et les marchés, si la créance est immédiatement exigible de par sa nature ;
  4. Le débiteur n’habite pas en Suisse ;
  5. Le créancier possède contre le débiteur un acte de défaut de biens provisoire ou définitif ;
  6. Le créancier possède contre le débiteur un titre de mainlevée définitive.


Le créancier doit rendre vraisemblable que le débiteur possède des biens patrimoniaux saisissables en Suisse, que sa créance existe, qu’elle est exigible, qu’elle n’est pas garantie par un gage et enfin, que l’un des six cas de séquestre est rempli.


S’il parvient à démontrer ces éléments, le juge du séquestre rendra alors une ordonnance de séquestre de manière unilatérale et sans entendre le débiteur.


L’effet de surprise recherché est alors total puisque le débiteur se retrouve privé de la disposition des biens séquestrés.


B.      De l’exequatur simultanée au séquestre (art. 271 al. 1 ch. 6 LP)


Le créancier, au bénéfice d’un jugement étranger en sa faveur, peut parfois rencontrer des difficultés à le faire exécuter notamment parce que le débiteur est domicilié dans un autre pays.


Le droit suisse prévoit la possibilité, dans une telle situation, d’intenter une procédure de reconnaissance et d’exécution du jugement en Suisse, appelé « exequatur », par le biais notamment de la Convention de Lugano (CL).


Le créancier au bénéfice d’un titre de mainlevée définitive contre le débiteur (art. 271 al. 1 ch. 6 LP), soit le plus souvent, d’un jugement, dispose désormais d’une possibilité supplémentaire aux autres cas de séquestre, celle de pouvoir requérir préalablement au séquestre le constat de la force exécutoire d’une décision étrangère produite comme titre de mainlevée (art. 271 al. 3 LP).


Le Tribunal fédéral, dans un arrêt récent, a désormais tranché une controverse laissée longtemps incertaine[1].


Dorénavant, le Juge du séquestre peut simultanément prononcer l’exequatur du jugement prononcé à l’étranger, cela même en l’absence de conclusions en ce sens.


Cela signifie que le créancier peut désormais faire d’une pierre deux coups et obtenir d’une part le séquestre des biens du débiteur en Suisse et d’autres part l’exécution du jugement en sa faveur, sans même avoir à le demander.


Celui qui souhaiterait agir de la sorte devra tout de même produire à l’appui de sa requête de séquestre une déclaration constatant la force exécutoire du jugement ainsi qu’un certificat du pays dans lequel il a été rendu. Des distinctions s’opèrent également selon le pays dans lequel le jugement a été rendu, en fonction de l’adhésion ou non du pays à la Convention de Lugano.


En conclusion, cette solution peut s’avérer extrêmement intéressante pour le créancier qui a connaissance de biens détenus en Suisse par le débiteur et qui bénéfice donc d’une action « deux-en-un » efficace, rapide et simplifiée, qui lui permettra de s’assurer de l’exécution du jugement obtenu à l’étranger.




[1] ATF 149 III 224

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